Le Petit Braquet
 
- Chronique n° 22 - Yvonne Reynders
 
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Yvonne Reynders

Coup de chapeau à

 

Yvonne REYNDERS

 


1937

Depuis maintenant deux ans que cette rubrique existe sur le petit braquet, nous avons retrouvé ou découvert ensemble de nombreux personnages qui ont fait la grande et les petites histoires du cyclisme. Parmi ces inventeurs et ses champions, rares sont les femmes dont nous avons évoqué le parcours.

Ce n’est pas parce que la bicyclette est notre petite reine (à nous les hommes). Il ne suffit pas d’une aussi jolie expression pour en faire un objet typiquement masculin.

Non nous sommes à des années lumières des interrogations de ces doctes et stupides messieurs qui, à la fin du 19ème siècle, se préoccupaient de la santé des femmes osant monter sur une bicyclette.
Voilà ce qu’en disait un journal de 1894 : « Pour les femmes, l’effet résultant de l’usage de la bicyclette est aussi très grave. Qu’on se souvienne des désordres, constatés médicalement, que causent les machines à coudre chez les ouvrières qui en font un usage constant et se livrent à cette fatigante occupation du matin au soir. Toutes sortes de maladies de genre spécial se sont révélées chez ces laborieuses, mais un fait particulier a été remarqué également, c’est le développement précoce dans ce milieu de travail de la nymphomanie et de l’hystérie caractérisée. La cyclomanie, en dehors de ses périls ordinaires, comporte pour les femmes les mêmes inconvénients que la machine à coudre. Elle amène les mêmes effervescences, les mêmes surexcitations lubriques, les mêmes accès de folie sensuelle. »

Nous sommes loin également des années 80 où certains professionnels voyaient d’un très mauvais œil les femmes faire du vélo et pire encore participer comme eux au Tour de France.  Ils parlaient alors, pour ne pas avouer leur machisme, de la dureté de ce sport et surtout de l’aspect esthétique de la chose. Tout cela parce qu’ils n’osaient pas dire franchement qu’ils préféraient voir leur femme à la maison. Peut être que certains craignaient la concurrence de jolies filles plus photogéniques qu’eux, y compris sur le vélo.

Ce n’est pas non plus un oubli de notre part mais il est vrai que le cyclisme féminin a mis très longtemps à se développer. Le premier championnat du monde sur route date de 1958 alors que chez les hommes il existe depuis 1927. En ce qui concerne les classiques, l’écart est encore plus flagrant. Alors que Liège Bastogne Liège et le Tour de Lombardie par exemple existent depuis plus de cent ans, les versions féminines de ces épreuves sont nées seulement au début des années 2000. En ce qui concerne les Jeux Olympiques là encore l’écart entre les sexes est immense. Première épreuve sur piste masculine : 1896 J.O. d’Athènes. Pour les femmes : 1988 J.O. de Séoul  et uniquement pour l’épreuve de vitesse. Pour la route J.O. d’Athènes en 1896 pour les hommes et J.O. de Los-Angeles en 1984 pour les femmes.
Ce n’est qu’au début des années 50 que le cyclisme féminin en France, en Belgique et en Hollande vit se développer un certain nombre de courses sur route. En France les principales épreuves sont le Prix Octave Lapize, le Prix Léo Wasse, le Prix de la SNECMA, le Prix Duverneuil, le Championnat de Paris, Paris-Gisors, le circuit de Bigorre et le circuit Lyonnais Auvergne en 4 étapes. En 1951 la FFC organisa son premier championnat de France féminin mais en 1957, le congrès de l’UCI rejeta comme l’année précédente la proposition de créer des Championnats du Monde féminins. Cette motion était présentée par la fédération britannique et elle reçut le soutien de l'URSS, la Tchécoslovaquie et la France. Le vote, secret, donna un résultat de 42 bulletins contre la motion, 35 bulletins pour, 3 nuls et 1 abstention. Ce résultat fit l’objet d’un commentaire dans le journal l' Équipe, dont je vous laisse le soin d’apprécier la pertinence : « Le bon sens a triomphé par 42 voix contre 36. Les femmes n'auront donc pas leurs Championnats du Monde. Elles devront ainsi se contenter des épreuves existantes et du cyclotourisme, ce qui correspond beaucoup mieux à leurs possibilités musculaires et physiologiques ».

Heureusement ce ne fut que partie remise et dès l’année suivante l’UCI accepta la création des premiers championnats du monde de cyclisme féminin dont elle confia l’organisation à la France.
Ce rapide tableau permet de se rendre compte que, jusque dans les années 80 les confrontations internationales étaient fort rares, et de fait le cyclisme féminin de haut niveau a eu beaucoup de mal à se développer. En dehors des championnats du monde, les meilleures représentantes de chaque nation ont pendant de nombreuses décennies trouvé fort peu d’occasion de s’affronter et donc de progresser. De cette pauvreté du calendrier international et de sa faible médiatisation découle une quasi absence d’archives papiers ou sur le net. Cela rend difficile une présentation fidèle des premières grandes dames du cyclisme féminin. Nous allons malgré tout tenter d’évoquer la carrière de celle qui fut probablement la première et la plus grande championne du cyclisme féminin : Yvonne Reynders. Seule notre Jeannie Longo nationale a fait mieux depuis.

 

Yvonne Reynders est née le 4 août 1937 à Schaarbeek, près de Bruxelles. Schaerbeek (en néerlandais Schaarbeek, anciennement Schaerbeek). Le nom de la commune signifierait «le ruisseau de la forêt" («schaer» forêt et «beek» ruisseau). Schaerbeek est l'une des 19 communes bilingues de Belgique. Cette ville est  située dans la Région de Bruxelles-Capitale. Limitrophe de Bruxelles elle compte aujourd’hui 110 000 habitants. Yvonne Reynders n’est pas loin s’en faut la seule personnalité, née dans cette ville puisqu’on trouve parmi les gens célèbres originaires de la ville, un Président de la République Française Paul Deschanel, et des artistes de renom comme Jacques Brel, Maurane et les dessinateurs Roba et François Schuiten.
Le parcours d’Yvonne Reynders est à l’image de la devise de sa ville natale : «Obstiné et fructueux ».

 

 


L'ancienne porte de Schaerbeek

 


Schaerbeek aujourd’hui

De la jeunesse d’Yvonne Reynders, de sa famille et de ses origines nous ne savons rien ci ce n’est que née dans une commune bilingue elle appartient à la communauté flamande. Notons simplement qu’elle naît dans le pays du vélo par excellence et qu’il existe déjà à cette époque en Belgique des structures permettant aux femmes de faire du cyclisme dans des conditions plus qu’acceptables avec entre autres de nombreuses réunions sur piste . Très vite Yvonne fait parler d’elle sur tous les terrains. En décembre 1955, âgée d’à peine 18 ans elle remporte brillamment le championnat de cyclo-cross de la région d’Anvers. Les capacités d’Yvonne dans cette discipline ne trouvèrent jamais un cadre international pour s’exprimer car les premiers championnats du monde de cyclo-cross n’eurent lieu qu’en l’an 2000. Les années qui suivent sont pour elle des années d’apprentissage et de progression émaillées probablement de nombreuses victoires dans son pays mais ce n’est qu’en 1958 qu’elle fait réellement son entrée sur la scène internationale en terminant 3ème du Grand Prix Fémina sur le vélodrome de Copenhague. Cette épreuve peut être considérée comme la première véritable compétition internationale de vitesse féminine. Dès cet instant, la carrière d’Yvonne Reynders est lancée et pendant huit ans de 1959 à 1966 elle règnera quasiment sans partage sur le gotha du cyclisme féminin. A l’aise sur tous les terrains Yvonne durant cette période va se construire un palmarès éloquent : 4 titres de championne du monde sur route et deux places de seconde, trois titres de championne du monde de poursuite et trois places de deuxième.

Durant ces quelques années ces principales adversaires sont :

 

 

 

 

 

- la luxembourgeoise Elsy Jacobs, championne du monde en 1958, 3ème en 1961 et record de l’heure en 1958,

 

   Yvonne Reynders à gauche et Elsy Jacobs à droite

- la britannique Beryl Burton, championne du monde sur route en 1960 et 1967 et 5 fois championne du monde de poursuite

- la russe Aino Pouronen, vice championne du monde sur route en 59, 3ème en 63, 65 et 66.

A la fin de l’année 1966 à vingt neuf ans Yvonne Reynders arrêta la compétition. Pendant dix ans elle disparut complètement du cyclisme, probablement pour s’occuper de sa famille. Et puis, en 1976, à 39 ans Yvonne Reynders fit un come back retentissant en remportant le titre national sur route et en allant chercher une médaille de bronze aux championnats du monde. Dix ans, comme une parenthèse de quelques semaines. En réussissant un tel retour Yvonne montra à toutes ses adversaires qu’elle n’avait rien perdu de son talent et qu’elle était capable de tenir la dragée haute à la nouvelle génération. Un tel retour après une aussi longue absence dénote une force de caractère et une capacité à se motiver, à s’entraîner, hors du commun. De tels sacrifices ne pouvaient s’arrêter au bout d’une seule année alors elle continua à courir une saison supplémentaire accrochant encore la médaille de bronze du championnat de Belgique sur route, avant de tirer définitivement sa révérence.

Aujourd’hui Yvonne Reynders est une vieille dame de 70 ans qui pratique encore le cyclisme. Un livre en flamand retraçant sa carrière vient de paraître. Il s’intitule « Yvonne Reynders : Sept fois dans le septième ciel ».

Dans une période où le cyclisme féminin se développait sur la pointe des pieds, le palmarès d’Yvonne Reynders est magnifique et seule Jeannie Longo peut se targuer d’avoir fait aussi bien. Alors chapeau Madame Reynders, chapeau pour votre courage et pour votre carrière exemplaire sur tous les terrains.

 

AMEDEO Rodoni, président de l'Union Cycliste Internationale, remet le maillot arc en ciel de championne du monde de pousuite féminin à Yvonne Reynders (belgique)

 

  

 

 

palmarèsPalmarès

Championne du monde sur route : 1959, 1961, 1963, 1966 (2e : 1962, 1965, 3ème en 1976, et 7ème en 1960)

Championne du monde de poursuite : 1961, 1964, 1965 (2ème en 1962, 1963 et 1966)

Championne de Belgique sur route : 1962, 1963, 1976, (2ème en 1960 et 1961, 3ème en 1977)

Championne de Belgique de poursuite : 1959, 1961, 1963, 1964, 1965, 1966, 1967

Championne de Belgique de sprint : 1966

 

biographie :

 

Yvonne Reynders : zeven maal in de zevende hemel* / Maurice Hermans . -Deurne : Book & Media Publishing, 2002. - 151 p. : ill.. - BOEK

* « Yvonne Reynders : Sept fois dans le septième ciel »

Yvonne Reynders

 

Sept fois au septième ciel

 

 

Ce livre rend hommage à Yvonne Reynders. A propos de la première fabulause carière de Reynders Yvonne. Elle a été sept fois champion du monde. Un record réalisé entre les années 1955 et 1967. Puis elle a raccroché le vélo sur le "crochet".

Toutefois, le "virus" est toujours là. En 1975, elle a commencé une seconde carrière dans le vélo, agée alors de 38 ans. Devenant championne de Belgique en 1976.

Elle reste dans le cyclisme Belge vivant une «affiche».

Yvonne Reynders

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